Watson for Oncology?

Les directives cliniques constituent un outil essentiel pour assurer de bons soins cliniques, non seulement en général mais aussi pour les soins oncologiques en particulier. Un diagnostic précis et un traitement basé sur l’évidence sont des facteurs capitaux pour un bon résultat pour le patient. Le collège d’oncologie et le KCE ont développé les directives en oncologie au cours des dernières années. Or, les progrès de l’oncologie sont très rapides et ils nécessitent en quelque sorte un monitoring en temps réel des nouvelles évidences au moyen d’une méthode standardisée de preuve et d’évaluation. Des approches ‘machine learning’ pourraient garantir des directives à jour. Dans ce cadre, l’e-platform d’IBM ‘Watson for Oncology’, une plateforme de support décisionnel, a été évaluée et on a examiné dans quelle mesure elle pourrait représenter une plus-value tant pour les prestataires de soins et pour les patients que pour les instances publiques impliquées dans les directives cliniques. ‘Watson for Oncology’ (WFO) fait appel à la linguistique informatique (PNL, programmation neuro-linguistique) et à l’apprentissage machinal (machine learning/intelligence artificielle). WFO est un programme qui fournit des informations au sujet du traitement des patients atteints d’un cancer. Le traitement proposé par le WFO est principalement basé sur les directives du NCCN (National Comprehensive Cancer Network) aux EU. De plus, Watson for Oncology a été enseigné par le Memorial Sloan Kettering Cancer Center de New York, US.

‘Watson for oncology’ (WFO) a été évalué sur trois plans:

  1. Une étude de concordance qui compare le traitement proposé par le WFO au traitement reçu par le patient.
  2. Pendant l’étude de concordance, les directives cliniques et la littérature utilisée par la plateforme de support décisionnel sont également évaluées.
  3. Une revue des aspects techniques nécessaires pour implémenter éventuellement le WFO dans le système de santé belge.

L’étude de concordance a été réalisée dans sept hôpitaux belges. Au total, 388 patients consécutifs ont été dépistés, qui ont été commentés pendant la COM.  Sur ces 388 patients, seuls 92 (24%) répondaient aux critères d’inclusion du WFO version 17.10. Cela signifie que le WFO version17.10 n’offre pas de support à 76% des patients belges. Dans 73% des cas, il y avait correspondance entre un des traitements proposés par le WFO et le traitement reçu par le patient.

La littérature et les directives de support ont été examinées d’une manière critique par les oncologues chargés de l’évaluation, à l’aide des cas introduits dans le système WFO. Bien que la littérature sous-jacente soit impressionnante, elle n’a pas été considérée comme à jour. Les oncologues ont formulé plusieurs remarques critiques que le WFO a reprises dans son dernier update.

Il n’est pas possible d’adapter la formation du WFO à la situation belge ou européenne. Le WFO a été enseigné par le Memorial Sloan Kettering Cancer Center (MSK) et les oncologues du MSK ont également offert leur soutien pour le classement des options de traitement. IBM WFO propose une alternative qui place dans une section distincte les informations relatives aux directives belges, à la posologie des médicaments et au remboursement. Ces informations ne peuvent pas être intégrées dans les recommandations de traitement du WFO.

Nous pouvons conclure que de bonnes directives cliniques sont un maillon indispensable pour de bons soins cliniques. En oncologie, on note une évolution très rapide de l’évidence au sujet de différents traitements. Par conséquent, un système capable de traiter d’une manière rapide et adéquate les nouvelles évidences, est indispensable. Watson for Oncology a été testé pour savoir s’il pouvait répondre à ces exigences. Il ne semble toutefois pas satisfaire au standard élevé d’actualisation des connaissances d’évidence dont disposent nos oncologues belges. Même si les recommandations en matière de traitement étaient en ligne avec ce qui est généralement administré en Belgique, l’outil n’offrait un support qu’à 25% des patients vus à la COM. Notre conclusion est qu’un outil tel que le WFO est indispensable mais que l’IBM Watson ne convient pas comme plateforme de support décisionnel pour les oncologues belges.